Le bourreau, de Séverin Cécile Abega. (15/02/2016)

 

La pierre angulaire du Bourreau, de monsieur Séverin Cécile Abega, est la mort d’un homme de lettres, intellectuel et journaliste - un long crayon -, provoquée par une faute de frappe, aux conséquences d’autant plus terribles qu’elle est insignifiante. L’ironie est belle et caractérise efficacement la situation politique et sociale que connaît l’Afrique depuis de longues années.


Cette ironie moqueuse, aux relents de désespoir, fait une entrée fracassante lors d’une conversation surprise par la narratrice. Ce premier échange, magistralement mené, entre le bourreau et une de ses clientes, prépare l’entrée, dans le récit, de l’assassin et imprègne l’ensemble de son histoire. Elle représente toute la richesse de ce petit roman – ou de cette longue nouvelle-, et soulage des descriptions, parfois excessives, de cous tranchés et de bouillons de sang.


Le bourreau, horriblement absurde, et absurdement sanguinaire, laisse toutefois entrevoir les signes enfouis d’une humanité obstinée : ses mystérieuses migraines qui obligent ses victimes au silence absolu ; un – unique – embryon de doute vite balayé par un rire méprisant, lancé tonitruant comme pour faire taire une petite voix intérieure…


Malheureusement, l’auteur nous laisse tout juste deviner une complexité de caractère qui dépose sur la langue à la fin de la lecture comme un goût d’inachevé. On voudrait connaître le passé du « héros », les raisons de son fatal acharnement, ses peurs et ses rêves.


Ce personnage mériterait un plus long développement que ce que permet un récit rapporté par une narratrice, à laquelle, somme toute, il n’a pas été accordé plus d’épaisseur que celle d’un simple témoin, un relais.


Le Bourreau est une histoire qu’on ne perd rien à lire et qui annonce, peut-être, pour la suite, une plus grande prodigalité.

 

Sylvia Placoly.




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